Cher Ubisoft

Oui, « cher » Ubisoft, parce que je t’aime bien quand même. T’es peut-être devenu un ogre vidéoludique, mais je t’associe toujours à la signification première du sigle : Union des Bretons Indépendants. Ça me parle assez. Et puis, soyons francs, j’aime bien tes jeux. Rayman, Beyond Good and Evil, les derniers Far Cry, la poétique pépite Child of Light, celle à venir de Soldats Inconnus : Mémoires de la Grande Guerre, South Park : The Stick of Truth, Watch Dogs… Et aussi, et surtout, ta fameuse saga Assassin’s Creed.

Du sang, du tourisme, des complots et des leçons d’histoire. Tu m’étonnes que ça marche. Ça marche très bien sur moi, même. J’ai accroché dès le début et pas vraiment raccroché depuis. C’est beau, c’est grand, c’est prenant. Mais surtout, c’est malin. Pas d’oiseux cours magistraux bourrés de références, juste une ludique et fidèle reconstitution, une discrète invitation à tourner quelques pages, à rencontrer quelques personnages, à vivre quelques moments. Par le petit bout de la lorgnette, le plus souvent. Et c’est bien ce côté-ci le plus intéressant.

J’ai vécu la Révolution américaine du côté des Kanien’kehá:ka, et je ne savais même pas être en réalité des Kanien’kehá:ka ceux que je connaissais sous le nom de Mohawks. Les « mangeurs d’homme » dans la langue de leurs ennemis. Entendre non seulement restaurée leur dignité de peuple oublié par la grande Histoire américaine et aussi leur langue, puisque tu as poussé le détail jusque là, ça m’a fait un bien fou à moi, et sans doute à tous ces joueurs que l’on prend pour des connards incultes et violents.

Edition collector, avec drapeau tricolore.

Edition collector, avec drapeau tricolore.

Mais là, j’ai du mal. Oh, pas tellement le fait que tu traites de la Révolution française. Niveau gameplay, ambiance, décors, ça claque. Mais que tu traites CETTE révolution, toi qui jusque là refusais la facilité de la grande-histoire-écrite-par-les-gagnants, ça me chagrine. Où sont passés les mohawks ? Les indiens de la République ? Où est le peuple oublié ? Le drapeau bleu-blanc-rouge arboré par un nouveau héros assez petit-bourgeois a dû les cacher. C’est étrange d’ailleurs, Ezio ne portait pas les couleurs de Florence, pas plus que Connor ou Haytham n’arboraient la bannière anglaise, ou l’américaine, et le seul pavillon qu’Edward hissait était celui, noir, des pirates.

Alors pourquoi Arno porterait-il le tissu aux couleurs de l’Eglise et de la Royauté, deux des ennemis traditionnels de la Confrérie des Assassins ? Sans doute as-tu caché la réponse dans le titre même du jeu : Unity. L’unité. Nous sommes d’accord, de la Révolution française est née l’unité du pays. Une terrible unité. Construite dans le sang, l’ethnocentrisme, le colonialisme, le culturicide. Le contraire de la liberté, le credo de la confrérie des Assassins. Et voir un de ces antis-système brandir ainsi fièrement le symbole de l’Etat qu’il devrait combattre soulève des questions, l’estomac, la fibre historique et la cohésion scénaristique tout à la fois.

Va, je suppose qu’encore une fois les français sont plus à l’aise avec l’Histoire des autres qu’avec la leur, avec les cultures et les langues minoritaires du moment qu’elles sont loin de chez eux. Mais j’aurais aimé -ô combien- que tu te souviennes de ton nom, mon petit « breton indépendant »…

Famille traditionnelle ?

Cher manifpourtous en colère,

Il paraît que tu fais partie des gens qui défilent le dimanche en défense de la « famille traditionnelle« . Ah. Tu fais bien ce que tu veux de ton jour de repos, moi je préfère aller traditionnellement aux chanterelles, vive la démocratie. Et donc pour toi, la « famille traditionnelle » si ardemment, dominicalement et catholiquement défendue, c’est, je cite : « Un papa et une maman ». Ah. Très bien. Mais là, non. La famille traditionnelle ce n’est pas « un papa et une maman », qui est un schéma récent, encore que devenu majoritaire dans la société. Une organisation qui n’a persisté que deux ou trois générations peut-elle être considérée comme « traditionnelle » ? Ça m’étonnerait, mon poulet.

En réalité, des schémas familiaux j’en connais deux dans la société traditionnelle (celle d’avant 1950, une époque qui devrait te parler) : celui des riches, et celui des pauvres, grosso merdo.

Je ne vais pas tomber dans le cliché facile, et présumer que dans la Manif pour Tous il y a aussi des pauvres. Si tu es dans ce cas, pour toi la famille traditionnelle ce sera plutôt « un grand-papa, une grand-maman ». Ben oui, les parents bossent, et vacances comme week-ends ne sont pas traditionnels. Donc on refile ses gosses à la personne qui a le temps et l’expérience pour s’en occuper : les vieux qui peuvent plus bosser. D’ailleurs, desfois, la mortalité étant super traditionnelle aussi, y aura « juste un grand-papa », ou « juste une grand-maman ». Ou même, suivant comment c’est géré dans la baraque, « deux grands-papas ». Ou un voisin, un cousin, une tante. Rien n’empêche d’ailleurs que la personne chargée de ton éducation soit un « vieil original » (c’est pas de moi, c’est comme ça qu’on disait, et c’était quand même moins péjoratif que les termes que tu emploies toi). Et même si ça faisait un peu couiner les grenouilles de bénitier (ou « coasser », c’est plus traditionnel pour des grenouilles), ça n’ébranlait pas plus que ça les fondements de la société ou celui du futur adulte. Et tes parents tu leur parles pas, ou pas comme à des parents de maintenant. Ce n’est ta famille que biologiquement, mais socialement, ce sont surtout tes patrons, au moins jusqu’à ce que tu te cas(s)es et que tu (te) reproduises un peu plus loin ce système.

Maintenant, présumons que tu sois brouzoufé jusqu’au trognon. Ou plutôt que tes parents le soient, et que ce soit une maladie héréditaire. Et bien dans ce cas tes parents, qui n’en branlent pas une, n’ont pas non plus envie de se sortir leurs doigts gantés de velours du fondement (le leur ce coup-ci, pas celui de la société) pour t’élever. Tu seras donc, tout petit, confié à une nourrice. Les musulmans disent « une mère de lait ». Quoi ? Oui, je sais, les musulmans c’est pas ta came, mais là ils ont une expression très bien que les cathos n’ont pas, alors ouvre un peu ton esprit, bordel. Tu auras donc un « frère » ou une « soeur » de lait, qui sont pas tes « vrais » frère ou soeur. Elle est pas belle ta petite famille traditionnelle ? En plus ils sont pauvres, ça te permet dès le départ de te foutre les glandes pour que tu fasses tout pour rester riche. Après ? Pareil, ton éducation, ton apprentissage de la vie, ne viendront pas de tes parents, mais de quelqu’un d’autre. Même de quelqu’un qu’on paye pour ça desfois. Genre un père porteur, mais de savoir.

Maintenant, de deux choses l’une : soit ce que tu veux c’est le retour à l’une de ces deux formes de famille, alors même que le modèle de société qui les faisait exister a disparu (et donc ça serait quand même un tout petit peu con), soit tu t’es trompé de mot (et ça serait quand même très con, vu que c’est ton slogan). J’avoue que je n’ose trancher.

Et puis en plus, je l’ai pas dit dès le départ pour pas trop t’embrouiller les cervelets, mais la « tradition » normalement ça s’enrichit, ça évolue et ça s’adapte à la communauté humaine qui la porte. Or tu veux revenir à quelque chose qui n’a pas existé… comment on fait ? On appelle Marty McFly et le Doc ?

100 000 € lo Poton !

Alors il paraît que ça, là :

http://www.capc-bordeaux.fr/

Et ben ça aurait coûté 55 000 €. Je parle du site, hein, pas du musée qui, si ça se trouve, à coûté moins cher.
Histoire de faire bonne figure, je me suis donc demandé 100 000 € pour réaliser Potonorsland. C’est pas grand-chose finalement

Même Khadafi à sa grande époque m'aurait filé plus pour me présenter aux présidentielles.

Comme je roule plus sur les jantes que sur l’or, je me suis emprunté du fric pour me payer.
Me voilà endetté pour 35 ans…